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Le rebirth : respirer pour renaître

Basé sur une respiration amplifiée, consciente et dirigée, le rebirth permet un acte d'abandon à soi-même pour libérer des émotions enfouies sans intervention du mental.

Alice Orhant

La méthode

Le sensationnel et le spectaculaire attirant certains médias, le rebirth a longtemps souffert d'une image qui le renvoyait à un phénomène d'hystérie, voire d'exorcisme. Pourtant, comme l'explique Jacques de Panafieu, qui fut l'un des premiers à l'introduire en France : « Le rebirth est simplement une technique de respiration consciente et dirigée. En se frayant un chemin dans le corps énergétique et physique, le souffle dissout les blocages et les tensions. Il permet la résolution de schémas mentaux inhibiteurs sans intervention de l'intellect ni de l'imaginaire. »

« Après tout, le corps en sait autant que l'âme », disait Paul Claudel. Le rebirth est un acte d'abandon à soi-même qui permet d'intégrer des émotions dépréciées, puis refoulées et inscrites dans la mémoire de nos cellules. Dans la vie de tous les jours, les émotions suivent un cycle énergétique qui mène à leur résorption ; les réprimer revient donc à court-circuiter ce cycle naturel et à les ressentir davantage, mais de manière déviée. L'énergie trop longtemps réfrénée s'exprime enfin pour devenir créatrice, remettant en mouvement ce que la peur avait figé, ouvrant des portes archaïques, faisant remonter des souvenirs enterrés et libérant des séquelles de traumatismes.

« En tant qu'analyste, j'ai pu vérifier que la prise de conscience n'était pas suffisante, que parfois même elle n'était pas nécessaire », confie Bernard Raquin, qui utilise plusieurs approches thérapeutiques et reconnaît au rebirth « l'avantage d'expérimenter à peu près tous les états émotionnels, alors qu'au quotidien on revit les mêmes indéfiniment et souvent de manière étriquée ». Il poursuit : « Le rebirth fait replonger dans l'état du nourrisson qui n'a pas encore décidé ce qu'il allait penser de lui et des autres. » C'est une expérience avec laquelle on ne peut pas tricher car elle se situe au-delà des mots. L'objectif est en fait d'amener le patient à voir jusqu'où il a été façonné pour lui permettre de se dépouiller de tout ce qui n'est pas lui. Loin de se limiter à la naissance, cette méthode réactive les circonstances dans lesquelles la personne s'est trouvée en danger (accident, agression, viol, avortement, opération, etc.).

Historique

Répandu aujourd'hui dans le monde entier, le rebirth a été découvert et expérimenté aux Etats-Unis, dans les années 70, par Leonard Orr et Sondra Rey. A l'origine, c'est une technique respiratoire basée sur l'hyperoxygénation. Son nom - rebirth, "renaissance" - s'explique par le fait que cette forme de respiration amplifiée permet de revivre sa naissance.

« La période fœtale et les premières années de la vie sont déterminantes pour la personnalité du futur adulte », confie Michelle Villa-Campa, qui propose à ses patients la résolution du traumatisme de la naissance comme première étape du processus thérapeutique. Jacques de Panafieu a créé l'Association française de rebirth à la fin des années 70. Elle regroupe actuellement une centaine de praticiens.

Déroulement d'une séance

Rebirth, l'art de la respiration consciente de Leonard Orr et Konrad Halbig. (Dangles, 1994).

La Rebirth-thérapie de Jacques de Panafieu. (Retz, 1989).

La Respiration consciente d'Anne-Marie de Vinci (Ronan Denniel, 1994).

Respire de Carole Entielle. (Elogia, 1996).

Lors de la première séance - après un entretien préalable qui a permis de clarifier la demande du patient -, le praticien fournit toutes les indications utiles sur le souffle et ses effets agréables ou désagréables (fourmillement, engourdissement, voire tétanie) qui dressent la carte des tensions enfouies dans le corps.

La consigne : accepter ces manifestations, continuer à respirer en faisant confiance au souffle... et au thérapeute.La séance se déroule dans un endroit calme avec une lumière tamisée. Allongée sur un matelas, la personne est invitée à se relaxer et à respirer (par le nez ou par la bouche).

Ensuite, elle amplifie sa respiration pulmonaire et accélère la cadence afin de déséquilibrer son mode de respiration habituel qui, lui, bloque certaines émotions et entraîne une restriction respiratoire. Une des caractéristiques du rebirth est d'insister sur l'inspir dans un cycle de respiration ample et circulaire (sans pause). L'intensité du souffle augmente jusqu'à ce que la respiration soit incontrôlée. C'est dans cette phase que surgissent émotions, mouvements, peurs, sanglots, colères, larmes, douleurs, frissons, grandes chaleurs, tremblements mais également éclats de rires. Une ventilation plus ample et accélérée mène, en effet, à une hyperoxygénation du cerveau qui expulse l'anhydride carbonique. Ce phénomène favorise la levée du contrôle du cortex sur les zones archaïques du cerveau, avec surgissement de la vie instinctive, des émotions refoulées, des souvenirs enfouis.

Peu à peu, la respiration redevient habituelle, la personne reprend contact avec son environnement.La phase de respiration est encadrée par deux temps de parole : le premier pour préparer l'expérience du souffle, le second pour intégrer ce qui s'est passé. C'est-à-dire ne plus lui opposer de résistance et laisser le cycle naturel des émotions suivre son cours. Il n'est pas nécessaire de nommer ou d'expliquer les épisodes traumati-ques ni même de s'en souvenir pour s'en libérer. Le rebirth travaille en effet sur des émotions très archaïques, appartenant au stade préverbal. Prenons l'exemple d'un patient réalisant qu'il respire à l'économie. Le thérapeute peut alors l'amener à se demander ce qui se passerait s'il osait prendre tout l'air dont il a besoin, une autre façon de dire « oser prendre sa place dans la vie ».

Le rebirth dans l'eau

Une variante du rebirth "classique" se pratique dans une eau chauffée à 36°-37°. Cette expérience favorisant la régression n'implique pas de respiration particulière. Soutenu et légèrement bercé par les autres participants, le patient retrouve spontanément une respiration accélérée, telle celle des bébés ou des amants, du combat, de la fuite ou de la souffrance. Nous partageons tous l'expérience de la naissance, d'une intensité unique. Tant d'événements nouveaux et simultanés se produisent. C'est à ce moment que l'individu ressent ses premières impressions sur ce qu'est la vie en dehors de l'utérus. La plus universelle étant que le plaisir et la souffrance sont liés.

Beaucoup gardent de cette expérience qu'il faut d'abord souffrir avant d'obtenir une satisfaction. Lumière, bruit, propulsion hors du ventre maternel, séparation physique, choc thermique, contact de l'air, de la peau, du tissu, du caoutchouc, du métal, etc. La façon dont ont été vécues ces "aventures" a nourri nos conclusions sur la vie. Des sentiments initiaux comme l'abandon, la solitude, le deuil, la séparation encombrent l'inconscient.

Pour certains, le souvenir de la douleur à la naissance et celui de la relation avec le médecin comme première figure d'autorité sont inconsciemment présents sous forme de rébellion et de méfiance envers toute personne en situation de pouvoir.

Indications

Le rebirth convient aux personnes dépressives, angoissées ou mal dans leur peau mais désireuses de changements radicaux. En revanche, il est déconseillé aux individus trop destructurés ou incapables d'assumer un bouleversement émotionnel car leurs peurs archaïques se renforceraient.

La fréquence des séances peut être hebdomadaire ou mensuelle. Chacune dure en moyenne 1 h 30, Le nombre de séances préconisé est d'au moins 10 séances.